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Mayotte la pénurie freine la croissance

Plus densément peuplé, moins équipé, le 101 département français affiche de mauvais résultats sur tous les indicateurs statistiques, comparé au reste de la France et des autres DOM. L’immobilier d’entreprise ne fait pas exception, avec un marché où l’offre est quasi-inexistante. Il se retrouve pourtant au cœur des enjeux de demain, au regard de l’objectif de convergence vers les standards nationaux et des grands projets de développement économique du territoire.

Une photographie des besoins en immobilier d’entreprise à Mayotte
Plus petit département français, Mayotte pâtit d’une forte contrainte foncière. Pour la première fois, une étude s’intéresse de manière approfondie et globale à l’immobilier d’entreprise de l’île aux parfums et permet d’en quantifier le parc. À travers l’analyse d’un grand nombre de données, cette étude participe à l’identification précise des besoins sur le territoire. En effet, l’immobilier d’entreprise est un moyen privilégié de développement économique et urbain. Sur Mayotte, le nombre d’emplois à créer dans les 10 années à venir est estimé à 47 800, soit 4 345 emplois chaque année.
Ce mercredi 21 septembre, Inovista et Aménagement Conseil ont présenté les conclusions de cette étude devant les acteurs du secteur de la construction et de l’animation de ville mais aussi des acteurs publics mahorais, afin d’en évoquer les points phares.

Une offre quasi inexistante sur le territoire
L’immobilier d’entreprise dispose d’un parc d’environ 250 000 m² de bâti dédié à l’activité économique. Malgré les efforts consentis ces dernières années, il faudrait encore augmenter de 260% le parc de locaux d’activité pour répondre aux besoins actuels des entreprises. Ce qui représente en substance de 420.000 m² complémentaires. Actuellement, un salarié du secteur tertiaire marchand dispose en moyenne de 7 m2, c’est moins que la surface minimum préconisée, qui est de 11m2 par personne et 15m2 par personne dans les espaces bruyants type open-space. Il faudrait, toujours dans ce sens, multiplier par 5 la surface de commerces pour loger ses quelques 6 500 emplois existants.
“Ces surfaces nécessaires mais inexistantes entrainent de multiples problématiques pour l’ensemble de la population au quotidien : la sécurisation des approvisionnements, les débouchés pour la production locale, l’accessibilité à certains services… Plus globalement, il n’est pas possible d’envisager un développement économique sans réfléchir à la répartition spatiale des activités économiques sur le territoire ” explique Vincent Le Baliner Fondateur et dirigeant d’Inovista.
Sur les dix prochaines années, on peut ainsi estimer à environ 950 000 m² les besoins futurs en immobilier d’entreprise à Mayotte, afin d’atteindre en 2032 un parc de 1 412 000 m² de bâtis. “Des projections à moyen terme tout à fait réalistes et envisageables, alors que 518 hectares de foncier sont d’ores et déjà identifiés pour la création de zones d’activités économiques” ajoute Vincent Le Baliner.

Un territoire dynamique mais dont la croissance est entravée
Mayotte se trouve être un territoire dynamique et en pleine croissance, mais qui connait aussi plusieurs freins sérieux au développement de son activité économique.
De grands projets porteurs d’activité pour ce territoire insulaire, sont aujourd’hui en discussion. L’exemple phare de la piste longue pourrait notamment permettre de répondre à de multiples attentes : développement du transport de marchandises, ouverture de nouvelles liaisons aériennes, accroissement du tourisme…
Avec une hausse de 8% de son activité sur un an, le principal port de Mayotte, à Longoni, devrait également arriver à saturation avant 2030, alors même qu’un doublement des besoins est attendu d’ici à 2037. Un projet d’aménagement conséquent est porté par le gestionnaire du port en ce sens, incluant une meilleure desserte et une amélioration des flux. Malheureusement aujourd’hui aucune surface de stockage supplémentaire de marchandises n’est prévue dans ce grand projet…
Sur le volet touristique, les infrastructures dédiées sont là-encore sous-dimensionnées. Comparé aux 65 000 visiteurs annuels sur l’année 2019, un doublement des arrivées est attendu pour les années à venir. “Principalement dans les secteurs du tourisme d’affaires et du tourisme d’agrément. Pour proposer les 1 000 nouvelles chambres qui seront nécessaires pour absorber le développement touristique attendu, il faudra créer l’équivalent de 42 000 m2 d’hébergement marchand” explique Irfani Toybou gérant d’Aménagement Conseil.

Rééquilibrer l’emploi sur le territoire
Mayotte souffre actuellement d’une trop forte concentration de son activité économique autour du secteur de Mamoudzou-Kaweni. Un fait qui entraine d’une part des valeurs immobilières très élevées, ainsi qu’une congestion importante qui entraine la saturation du réseau routier.
“Mamoudzou est le cœur économique du département, regroupant 51% des emplois pour seulement 28% des habitants. L’agglomération concentre à elle seule 80% des immeubles professionnels”, explique Vincent Le Baliner, ajoutant que “le réseau routier de Mayotte, prévu pour 1 000 véhicules à l’heure, en accueille plus du double »
Adopté en 2018, le plan global transports et déplacements (PGTD) prévoit de nombreux projets de requalifications de routes existantes qui pourraient permettre d’apporter une réponse aux difficultés évoquées. “Mais il demeure insuffisant en l’état pour fluidifier totalement le trafic qui est appelé lui-aussi à s’accroître. Il faudrait notamment créer de nouvelles routes “, ajoute-t-il.
Par ailleurs, et pour créer 34 278 emplois dans le secteur marchand (hors agriculture, hébergement, restauration et secteur non marchand), ce sont 950 000 m² qu’il sera nécessaire de bâtir dans les 10 ans. “Cet objectif ne peut être mené à bien sans inclure dans la réflexion un rééquilibrage territorial indispensable, le développement d’axes de communication et d’infrastructures routières nécessaires aux déplacements, tout en incluant dès à présent des constructions à faible émission de CO2 et permettant une bonne maîtrise des ressources naturelles”.

Des efforts coordonnés sont nécessaires
Les limites sur le territoire de Mayotte sont bien réelles, et le temps est déjà compté pour les efforts à réaliser au soutien de sa croissance. Mais le développement des structures immobilières qui permettront d’atteindre les objectifs affichés est envisageable et possible.
Pour mobiliser le foncier, les deux entreprises proposent plusieurs pistes de réflexion comme la mise en place d’une taxe d’aménagement majorée mais aussi d’associer directement les propriétaires à la réalisation des projets. “Mayotte dispose de près de 5 fois l’espace nécessaire à la construction de locaux qui permettront de créer 47 000 emplois et atteindre un taux d’emploi de 40% d’ici 2032 contre 32% en 2021”, appuie Vincent Le Baliner. “Pour cela il faudra que tous les acteurs, qu’ils soient privés ou institutionnels, coordonnent leurs efforts autour de projet cohérents et structurants pour le territoire au travers de co-production “.

Depuis 2014, la société de conseil Inovista, s’est dotée d’un bureau d’études dédié à l’analyse des marché et la programmation urbaine: Inovista Consulting & Research. Afin de garantir l’adéquation de des projets aux territoires et aux marchés, Inovista Consulting & Research réalise pour des acteurs publics ou privés des études de programmation, d’analyse des marchés, de prospectives et de stratégies. Une méthodologie éprouvée à La Réunion et à Mayotte avec la réalisation de plus de 60 études en 5 ans. Une équipe de 4 personnes dont 1 data manager et 1 urbaniste avec l’appuit des 16 autres membres d’Inovista.

Pierre Marchal

Après avoir exercé onze ans comme journaliste au Quotidien de la Réunion, fondateur de l’agence photographique MozaikImages regroupant 95 auteurs dans l’océan Indien mais aussi au Japon et en Australie, Pierre Marchal a opté en 2005 pour une activité free-lance lui permettant de se consacrer à son sujet de prédilection : l’être humain. Anakaopress est née. Aujourd’hui à la tête du magazine de sport Gadiamb et de Paradise Island, Grenadine est un nouveau challenge. Tél : 0692 65 79 95 Mail ; marchal@anakaopress.com

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