Bali sur plage à Saint-Paul
A quelques pas du cimetière marin, dissimulée derrière un édifice en bois, s’est blotti un havre de paix. Cette ancienne maison de pêcheur devenue le refuge d’un talentueux architecte vous ouvre ses transparences dans un écrin de verdure.
Baignées par l’océan, quelques notes de piano entonnées par Jorge Bolet et suggérées par Serguey Rachmaninov vous accueillent dans un univers hétéroclite, une petite maison où il fait bon vivre. Rolland Volk, son hôte, vous accueille chaleureusement proposant un jus de tangor ou une bière locale. Tout laisse passer la lumière, l’artiste originaire d’une famille de métalliers alsaciens a joué de la matière composant ainsi avec le bois, le béton, le zinc et la pierre. Des matières premières nobles, utilisées avec justesse et délicatesse. L’intérieur se confond avec le dehors, la salle de bain s’improvise à l’air libre protégée simplement de parois de querons maintenus par des grillages d’acier. Au mur de celle-ci un organisateur vintage, panneau de rangements multiples moulés par le désigner Ingo Maurer.
Je déteste le mot Déco, j’aime le fonctionnel, intégrer le pratique en toute discrétion .
Tout ici repose sur le détail et le surprenant, le référencé d’auteur et l’inconnu, le sobre et le kitch comme ce petit présentoir d’oiseaux piailleurs en résine bleue rapporté d’un voyage. Une petite miniature de DS vert amande, un lampadaire Toio en « phare de voiture » d’Achille Castiglioni, un lustre imposant en placage de bois, un frigidaire américain, une ancienne machine à coudre encore opérationnelle… tout est prétexte à raconter une histoire. L’ilot central de la cuisine est pratique. Conçu en Italie par Run-Désign, il impose sa transition entre l’espace repas et la pièce de vie. Ici le coin « petit-déjeuner » avec ses accessoires, là une partie « préparation des plats et des mets » avec robots en tous genres. Au-dessus, un néon diffuse sa lumière blanche sur des tubes à essais desquels dépassent quelques boutures de plantes. Sur le plan de travail, deux flacons d’épices en forme de toupie attisent la curiosité du visiteur. Des carafes chinées rivalisent avec une balance d’épicerie ancienne. Un panneau de la rue du Houblon vous toise depuis un mur. Ailleurs l’évocation d’un tableau de Rizzi (Love is in the air), puis une création de Corinne Granger ou une œuvre protéiforme de l’artiste péi Lionel Lauret, une composition de Murano, un buste féminin, une petite minitrail rouge dans le passage, un vase inspiré de Niki de Saint Phalle et l’étonnante étagère MDF Italia qui par la magie de 4 vis et de tiges en biais savamment disposées peut soutenir jusqu’à 1 tonne. La moindre occasion suppose l’effervescence créatrice du propriétaire pour un mélange des genres et sources d’inspirations multiples dans une une joyeuse cacophonie savamment orchestrée. La télé, signe désuet d’une modernité connectée, repose sur l’ancien banc en bois de tamarin de la table d’origine…
J’aime créer des émotions, rapporter une histoire aux objets et les détourner
Une rose du désert vous attire dans le jardin aux inspirations balinaises. Un bassin piscine se fond dans la végétation ambiante, plus loin un petit bungalow isolé se devine juste à la bordure du sable noir de la plage volcanique…tout ici contribue à la zénitude creusant l’harmonie entre la nature et l’éclectisme des détails savamment réfléchis par la simplicité et l’audace de cet immense artiste… connotations vintage et balinaise ont trouvé place à La Réunion.
Texte Nadine Gracy
Photos Pierre Marchal